Indonésie : En pays Minangkabau
Maninjau
En route pour un long voyage
Vendredi 12 février, nous quittons la pension à 14h et prenons le ferry qui nous dépose à Parapat, la ville principale située sur les rives continentales du lac Toba.
La traversée ne dure qu'une quarantaine de minutes. Au port, il faut prendre un "opelet" (taxi collectif) pour rejoindre la gare routière où nous arrivons très en avance. Notre rendez-vous est pour 16h30 et il n'est que 15h. Nous avons largement le temps d'acheter des provisions pour le voyage, d'autant plus que notre bus est en retard et ne pointe son nez à la gare qu'à 18h30…
La bonne surprise, c'est qu'il est de meilleure facture que les tas de ferrailles que nous avons pris jusqu'à maintenant. Il y a même l'air conditionné et les toilettes à l'arrière (mais on verra plus tard que les toilettes dans un bus, ce n'est pas ce qu'il y a de mieux…).
Le trajet entre Parapat et Bukit Tinggi doit durer quinze heures. Après deux heures de route, nous comprenons que nous ne dormirons pas beaucoup cette nuit…
La Trans-Sumatra s'apparente à une départementale dans le meilleur des cas mais c'est surtout une piste qui traverse la jungle, avec des ornières qui font penser aux routes de l'impossible. Il faut souvent s'arrêter pour laisser passer les véhicules en face et cela prend parfois plus de 5 minutes avant qu'un camion puisse passer ! La voie est en si mauvais état que les toilettes à l'arrière ont dû déborder parce qu'on a l'impression d'avoir la tête au-dessus des égouts. Les fumeurs de Kretek (des cigarettes parfumées au clou de girofle), qu'on maudissait au départ de Parapat (les Indonésiens fument cigarette sur cigarette, peu importe si le bus est climatisé), atténuent un peu les mauvaises odeurs.
Un peu avant 23h nous avons une grosse frayeur quand notre bus fait une brusque embardée puis dérape en tanguant dangereusement, avant que le chauffeur rattrape la situation et remette les roues dans le sens de la route (ouf !).
Est-ce la cause ou la conséquence de cet écart, toujours est-il que quelques centaines de mètres plus loin, nous devons nous arrêter : pneu crevé !
Cet épisode nous tiendra éveillés un bon moment. Hélas, le changement de conducteur, juste après la réparation, n'est pas pour nous rassurer. Le nouveau chauffeur semble vouloir rattraper le temps perdu et a une conduite plus que nerveuse. Plusieurs fois, ça passe de justesse avec les véhicules que nous croisons…
Aussi, quand le troisième chauffeur, plus prudent, prend le volant vers 3h du matin, ce n'est pas pour nous déplaire ☺. Ce qu'il y a de bien quand on voyage de nuit, c'est qu'on ne voit pas les ravins…
Au lever du jour, les paysages de rizières en terrasses bordées de cocotiers aux alentours de Rao et Sikaping sont magnifiques !
Romain est une fois de plus le seul à avoir pu dormir, même s'il nous dit avoir eu un sommeil haché (c'est dire si la route était mauvaise !), et quand il ouvre un œil, nous luis souhaitons un TRES BON ANNIVERSAIRE !
À Bonjol, nous passons la ligne de franchissement de l'équateur ☺. Puis la route serpente dans la montagne avant d'arriver à Bukit Tinggi (littéralement : hautes collines) à 10h30, après 16 heures de voyage.
Mais nous devons encore prendre un "opelet" pour aller à la gare routière et enfin un dernier bus pour Maninjau, un village situé en bordure du lac éponyme, à 1h30 de Bukit Tinggi.
À 13h, nous pouvons enfin poser nos sacs au Murao beach bugalows, en bord de lac, un endroit charmant et très reposant.
Comme le lac Toba, le lac Maninjau est d'origine volcanique (caldeira) et est entouré de montagnes. Le matin, il est aussi lisse que la surface d'un miroir, aucune ride pour troubler le calme de ses eaux.
Les Minangkabau
Ici, la plupart des gens appartiennent au groupe ethnique des Minangkabau, une société matriarcale très forte. Les femmes sont propriétaires de la terre, des biens immobiliers et mobiliers et les transmettent à leurs filles. Les hommes n'ayant rien, ils sont contraints d'émigrer s'ils veulent faire fortune. Toutefois, leur devoir est de faire profiter le village de leur réussite et ils s’occupent de la religion et des affaires politiques.
Les enfants portent le nom de clan de leur mère. L'homme qui en a la responsabilité n'est pas le père, mais l'oncle maternel (il s'occupe aussi de leur éducation). Pour le mariage, c'est la famille de la fille qui vient demander la main du garçon. En cas de divorce, la femme garde les enfants (la loi islamique rappelle aux Minangkabau que "la mère mérite trois fois plus de respect que le père").
Les Minangkabau sont presque tous musulmans et les mosquées sont nombreuses. On en compte plusieurs à Maninjau et l'appel du muezzin commence dès 4h30 du matin (et ne prend fin qu'environ une heure plus tard…). Autant dire qu'il est difficile de bien dormir au petit matin…
Notre séjour au bord du lac
Pour parcourir la route qui fait le tour du lac, nous louons des scooters, moyen de locomotion idéal. Les routes qui mènent aux villages disséminés sur les rives traversent de jolies rizières. Les terres sont fertiles et la région produit de la cannelle, du café, des noix de muscade, de la cardamome que les habitants font sécher sur le bord des routes.
Parmi les autres activités de notre séjour au bord du Maninjau, nous louons un canoë et tentons la baignade dans les eaux tièdes du lac.
Les garçons ont d'abord du mal à diriger l'embarcation (peu stable il est vrai) et à pagayer en cadence, puis ils s'enhardissent et s'éloignent à bonne distance au milieu du plan d'eau.
Quant à la baignade, si nous apprécions la température de l'eau, mieux vaut ne pas rester trop longtemps debout sur la berge car nous sortons couverts de petites sangsues qui s'agrippent à nos pieds (pas très agréable…).
La vallée d'Harau
Mercredi 17 février, nous quittons le lac Maninjau vers 8h du matin. Alors que nous marchons pour nous rendre au carrefour où nous comptons prendre un bus pour Bukitinggi, une voiture s'arrête à notre hauteur et le chauffeur propose de nous y déposer. Nous négocions rapidement le tarif (à la baisse) et montons dans le véhicule. Pour le prix du bus, nous effectuons le chemin en taxi "presque" privé (une dame est assise à l'avant et se rend également en ville).
À la gare de Bukit Tinggi règne un chaos, à l'Indonésienne…
Le bus pour Sarilamak vient de partir, le prochain ne part que dans une heure environ, mais on connaît la ponctualité ici ! Une heure et demie plus tard ☺, nous quittons la gare. Notre bus va à Pakangbaru mais passe par Sarilamak. Les passagers qui montent en cours de route ont tous de gros sacs de riz qu'il faut empiler sur le toit et dans les couloirs. Sortir du bus dans ces conditions s'apparente à un exercice d'escalade ☺.
À Sarilamak, il faut prendre un "ojek" (une moto-becak) pour effectuer les derniers kilomètres.
À une cinquantaine de kilomètres de Bukit Tinggi, dans un superbe décor de rizières et de hautes falaises verticales, se trouve la vallée d'Harau. Les paysages ici sont grandioses et les villages disséminés dans la vallée paraissent paisibles.
Pour profiter du décor, nous louons des scooters et allons au hasard sur les petites routes et les chemins qui longent les rizières. Un peu partout, des cascades tombent des falaises abruptes et alimentent des cours d'eau qui irriguent les champs verdoyants.
Les habitants de la vallée sont majoritairement des "Minangkabau".
Nous ne comptons pas les centaines de "hello" qui nous sont adressés, toujours avec un grand sourire. Quand nous nous nous "perdons" sur les chemins, les gens sont ravis de pouvoir nous aider et nos quelques mots échangés en indonésien les amusent.
La pension "Abdi Homestay" est un endroit très tranquille situé au pied d'une impressionnante falaise, haute d'une centaine de mètres, le long de laquelle descend un ruisseau en cascade. Le décor est grandiose. Après la première nuit passée à "Echo homestay" (Abdi était complet...) où les huttes étaient charmantes mais plutôt basiques, nous sommes contents de nous installer ici.
Les 6 bungalows font face aux rizières et sont très bien intégrés dans la campagne.
Nos hôtes font tout leur possible pour que l'on s'y sente bien, leur rendang de poulet (un plat local où les morceaux de poulet ont mijoté dans du lait de coco cuisiné en curry) est excellent ☺.
Le soir, vers 18h, on peut contempler l'étrange ballet migratoire de centaines d'oiseaux blancs qui quittent les rizières pour aller nicher sur un gros arbre, pas très loin de la pension.
Puis, le concert des grenouilles commence à la nuit tombante et les cris de singes ou les chants de "cecak" (sorte de petit lézard qui s'apparente au margouillat) complètent le récital. On se sent bien ici !
Après plusieurs jours passés dans la campagne tranquille d'Harau, nous devons nous rendre en ville, à Padang (la troisième plus grande ville de Sumatra), pour prendre l'avion en direction de Banda Aceh (à l'extrême nord de l'île).
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